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Docteur Youssouf Maïga Moussa
16 août 2015

Qui nous gouverne ?

Julien Freund définissait la politique en ces termes : « C’est l’activité sociale qui se propose d’assurer, par la force généralement fondée sur le droit, la sécurité extérieure et la concorde intérieure d’une unité politique particulière, en garantissant l’ordre au milieu des luttes qui naissent de la diversité et de la divergence des opinions et des intérêts. ». Autrement dit, l’action politique a entre autres finalités d’assurer la paix, la sécurité, l’unité (cohésion sociale), l’ordre, etc. Mais dans la pratique, les gouvernants passent à côté de ces principes. Rien qu’au niveau du pouvoir législatif (Assemblée Nationale), la cohésion, l’unité, le sérieux ont maille à se concrétiser depuis le départ forcé de Hama Amadou. La politique qui est considérée comme la science royale chez les Grecs est méconnaissance sous les démocraties tropicalisées, notamment celle qu’innove la guricratie. Nous sommes quasiment dans le renversement platonicien de tous les vrais concepts de la politique : le vivre bien, la concorde, le souci de l’intérêt commun, le juste, le droit, les lois, le bonheur des citoyens, etc. Aussi faut-il à juste raison se demander qui nous gouverne ? Et comment sommes-nous gouverner ?

Si on souscrit aux propos de l’honorable Député Nassirou Halidou, les réponses coulent de source. Lors de son point de presse, il a décliné plusieurs éléments. Nous n’en retiendrons que quelques uns qui nous semblent essentiels pour ne pas saturer notre texte, et nous éloigner de notre modeste réflexion :

Le Député Nassirou Halidou soutient que nous sommes gouvernés par la « corruption puante » ; par « la mauvaise gouvernance » ; par « la haine de Mahamadou Issoufou envers certaines catégories de nigériens, en particulier les opposants qui représentent pourtant plus des deux tiers des élus locaux, et 55 députés élus sous la bannière des partis politiques de l’opposition sur 113 » ; par des ministres qui ne se parlent même pas, s’insultent ou se giflent au vu et au su du Président de la République ». Et, de poursuivre : « si on ne viole pas les textes de la République par-ci, on gifle de pauvres policiers en fonction par-là » ; « l’impunité est érigée en mode de gouvernance », etc. Je vous laisse le plaisir de lire le reste de son point de presse dans le N°57 du 9 avril 2015, du Nouveau Républicain.

Ainsi qu’il apparaît, la liste des maux est extrême. A la lecture du texte du point de presse de l’Honorable Député Nassirou Halidou, on ne peut pas asserter tout de go, que nous sommes dans une véritable démocratie constitutionnelle. Rousseau a bien établi « qu’il n’y a point de libertés sans lois, ni où quelqu’un est au-dessus des lois », et Montesquieu d’exiger une stricte séparation des trois pouvoirs dans une République : le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif, et le pouvoir judiciaire. Partant de ces quelques remarques de Rousseau et de Montesquieu, nous pouvons à distance comprendre le coup de cœur de l’honorable député Nassirou Halidou, que partagerait certainement tout citoyen conscient du drame de notre démocratie. Si selon Nassirou Halidou, l’Assemblée Nationale ne joue plus son véritable rôle, à quoi sert alors dans une démocratie constitutionnelle le « Pouvoir législatif » ? Mais le Nec plus ultra de cette intervention, c’est l’immixtion selon le député d’un personnage fort lugubre, d’une grande mauvaise réputation qui sévit dans le guri système : Salif Diallo qui jouit de beaucoup de faveurs, et de surcroît a rend de ministre. Un autre aussi dénommé Ekolo Ekolo, ami paraît-il du Président, excelle dans le même profil criminel, dans des trafics de tous genres. Il y a en effet de quoi s’inquiéter Honorable député. La démocratie au Niger va mal, elle est sans conteste aux mains d’escrocs, de criminels recherchés par Interpol. Et l’Etat du Niger (guricratie) laisse-faire nonobstant tous les détournements qu’ils opèrent contre les intérêts du Niger. On peut ici et maintenant déduire que nous sommes mal gouvernés. Et en termes de chiffres, tout va mal : IDH-zéro, endettement excessif, etc.

Si nous jetons un regard lucide sur les faits, et repensons les concepts, il saute bien aux yeux que ce n’est plus ce peuple cher aux Grecs, (démos = peuple) qui incarne le souverain, ou à Abraham Lincoln, qui considère la démocratie comme « le pouvoir du peuple, par le peuple, et pour le peuple ». Autrement dit, c’est le « peuple » qui exerce le pouvoir, ou fait la politique, en militant soit au sein des partis politiques, ou dans les organisations de la société civile dans une démocratie constitutionnelle qui reconnaît la diversité des partis et le rôle politique de l’opposition. Or, nous constatons que notre démocratie est aux mains d’une certaine classe politique, un « noyau d’un noir étincelant », une « élite » chouchoutée tels des bébés kangourous dans la classe dominante qui hypothèque, limite le jeu démocratique normal. Ailleurs dans les Etats dits de démocratie émergente, ce sont des technocrates qui s’accaparent de la politique et de la gestion du pouvoir. Autrement dit, dans de telles démocraties, ce sont des spécialistes, des gens très compétents qui apportent des solutions pratiques aux problèmes de la gouvernance.

Le paradoxe, c’est que dans le gurisme, ou guricratie, tout le monde fait la politique. Tout le monde s’ingère de tout. D’où la cacophonie dans la gestion de l’Etat. C’est la raison pour laquelle tous les bons et les mauvais oiseaux émigrent vers le miel du gurisme. Cette démocratie risquerait d’engendrer des formes hybrides de micros-pouvoirs. La preuve, même au sein du gouvernement, les ministres s’engueulent, s’entre-déchirent, car le gouvernement n’est pas de type monocéphale, authentiquement Tarraysite. L’hétérogénéité, voire le patchwork de dissidents entame la qualité du gouvernement, et de la bonne gouvernance dont se targuent les chantres de la guricratie. Le talentueux PM (Brigi Rafini) fait de son mieux pour sauver la colonne vertébrale de la guricratie, mais tiendra-t-il encore longtemps ? Les échéances présidentielles s’annoncent dures. Le tonton STJ a commencé à taper sur la table. Cela dénote de la situation délétère au sein du MRN. Le climat politique guristique a changé, car des nuages noirs s’annoncent, à l’identique de ceux dont nous sommes habitués au Niger en pleine saison de pluie. Le gurisme va-t-il continuer à supporter des ministres récalcitrants qui méprisent la morale publique et les lois ? Ou va-t-il s’atteler à goupiller correctement le Programme de la Renaissance ?

 Il nous semble qu’il y a encore des choses à terminer. Par conséquent, ceux qui sèment le « trouble », et dénaturent la guricratie, doivent partir. Le Président Mahamadou Issoufou a joué son jeu pendant 4 ans, les dissidents ont profité suffisamment du gurisme. N’est-il pas temps de donner aux vrais militants, aux vrais cadres de Tarraya qui attendent depuis des années, enfin leurs places, et profiter pou mettre les escrocs en prison. Un début de fin à l’impunité en cette veille de fin de mandat du Président est possible. Il faut simplement oser.

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