Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Docteur Youssouf Maïga Moussa
16 août 2015

Les inprudences en politiques

Guichardin disait : « C’est toujours les erreurs des gouvernants qui causent presque toujours la ruine des cités ».

Dans le jeu de la Force et de la Chance, il faut souvent savoir évaluer les « imprudences types », comme on parlerait en mathématiques d’« écarts types ». En politique existe une catégorie de personnes imprudentes, probablement du fait de leur accointance avec le pouvoir,  soit de leurs multiples relations avec les hommes politiques, ou des militaires politisés, soit en fin du fait même de leur appartenance au parti au pouvoir, se croient alors au-dessus des autres citoyens, ou se prétendent pénalement intouchables,  comme des sortes « d’immunisées du droit ». A exactement parler, cela s’appelle de la jouissance de l’impunité qui est toujours éphémères. Car aussitôt qu’un régime nouvel prend place, les mêmes personnes impunies sont rattrapées par les lois de la République. Autrement dit, le criminel politique a beau courir pendant des années, il rendra compte un jour devant les tribunaux de l’Etat. Ceci pour dire que l’argent mal acquis, l’argent de l’Etat indûment perçu restera toujours un crime.

Gouverner un Etat ne doit se transformer en forteresse de la maffia, de la corruption, des détournements, etc. Le Prince a obligation, tel un roi, d’assurer le respect des lois et de leur application à tous les citoyens. Le bon Prince, c’est le « Bon roi selon Philodème de Gadara ». En effet quand dans une démocratie le peuple accorde son choix à un dirigeant (légitime), alors il a carte blanche de faire régner les lois contre les méchants, de sécuriser les citoyens et leurs biens. Or, il se trouve aujourd’hui dans certaines démocraties, la tendance nocive de l’opposition de vouloir usurper le pouvoir au Prince. Disposant des moyens répressifs de l’Etat, le Prince est alors dans son droit, dan sa fonction de leur appliquer la force et le droit, en vue de la tranquillité publique et de l’ordre social. D’aucuns par exemple aujourd’hui récuse l’usage excessif de la force, notamment de la police judicaire contre les citoyens et la presse. Si on se situe dans une optique pragmatique, d’efficacité, on peut comprendre et justifier le « faire usage » des ces moyens de l’Etat. Quand par exemple des milliards sont injectés dans l’armement militaire, les citoyens Nigériens ne trouvent rien à redire, même l’opposition acquiesce, mais quand c’est un avion de plaisance, à partir de cet instant, ça fuse de tous côtés : scandale ! Un avion à 21 milliards quel gâchis ! De surcroît avec un grand lit à bord. N’est-ce pas suspect ? A quelle fin ? Le Prince outrepasse ses droits. Mais on ignore souvent qu’un Président est un être fait de corps et de chair, il n’est pas un « Cyborg= robot », qui ne connaît pas la fatigue et le sommeil. Un lit à bord d’un avion, est même un bien, car dormir pendant un long vol es réparateur pour le Prince. Le commun des mortes pensent en effet que la vie de Président est une sinécure, une vie de détente, à ne rien que voyager et signer des papiers et des décrets. L’avion fait partie de l’efficace de sa fonction de Président de la République. Aucun chef d’Etat aussi longtemps qu’il est possible pour lui dans un budget de l’Etat de s’offrir un beau avion, ne peut bouder son plaisir. De même que certains directeurs se promènent en 4X4, et bien, surtout au Niger où l’apparence est prisée, il est de juste que le Premier Magistrat de l’Etat soit différent des autres, autrement c’est demander à Napoléon d’aller à pieds en Guerre. Ici comme ailleurs, nous convenons que c’est l’excellence éthique qui distingue les dirigeants. Est-ce une imprudence politique ?

Pour l’opposition, c’est même pure folie d’avoir acheté un avion à un tel prix ; en revanche pour la majorité au pouvoir, un avion est un plus dans le vaste chemin du Niger vers la Renaissance. Mais, il y a un temps pour diriger un Etat, car l’Etat reste pendant que les dirigeants passent. Et chacun est appelé un jour à justifier sa gestion. Tandja Mamadou a été courageux face à la presse en suggérant même qu’un audit de sa gestion soit fait, autrement dit, il assume sa gestion et peut justifier accepter le verdict de la justice en  cas de délits graves. C’est cela se comportement en bon citoyen, et assumer ses « imprudences » si d’aventure elles existent, ou se sont avérées comme telles. Ainsi, il y a un temps pour s’empiffrer des richesses de l’Etat et un temps pour rendre gorge. Il est aisé de voir aujourd’hui avec quelle vitesse et quelle arrogance certains hommes politiques, et des pseudo-alliés s’embourgeoisent. Cela est en effet inquiétant dans un Etat à l’IDH zéro, où le social est en piètre état, où le citoyen n’est pas fier d’emprunter correctement les routes dans la capitale, où les feux de stoppe n’arrivent pas à gérer convenablement la circulation routière, etc. Les citoyens observent avec intérêt l’exhibition, le show des richesses nouvellement acquises, qui sont justement des « imprudences », car par leurs actes, ces individus nouvellement riches ne s’abstiennent difficilement de ne pas paraître. Le peuple en effet est plus prompt à juger les « imprudences » des gouvernants et de leurs amis, que leurs actions justes (minimes). L’attitude raisonnable qui s’inspirerait de l’histoire, consisterait à prendre comme étalon de mesure l’ancienne prudence du Président Seini Kountché, qui dans sa gestion de l’Etat, s’est abstenu de voler les deniers publics et de vider le Trésor. Il était donc un Président prudent, ce qui valut jusqu’à aujourd’hui la considération de la part de certains de nos concitoyens, nonobstant sa rigueur, et les autres facettes sombres de son pouvoir autocratique.

Cette éthique de la gestion de l’Etat commence à se dissiper dans nos démocraties, notamment au Niger. C’est quasiment devenue une sorte de vertu politique de célébrer son nouvel statut de politicien parvenu. Aussi, inclinons-nous à croire que la prudence politique est devenue  une denrée dans nos Etats africains. Le cas le plus édifiant est cette arrestation et le jugement de Karim Wade, qui pendant la gestion du pouvoir de son père a excellé dans le détournement et le vol des richesses du Sénégal. Ce procès est la somme de ses actes, de ses « imprudences ». Il est temps pour lui de rendre gorge. Cependant, ce qu’il faut avancer dans une perspective machiavélienne, c’est que la nature humaine demeure invariable : les hommes politiques, les gouvernants, et les gouvernés sont mauvais. Les gouvernants particulièrement, deviennent de plus en plus et dangereusement mauvais dans la gestion des affaires de l’Etat. Tous ces milliards de Karim Wade sont des manques à gagner pour le Sénégal. Quand l’Etat, sa gestion deviennent des choses, la propriété de ceux qui gouvernent, alors le vol est ouvert, massif. L’Etat est apparenté à un grenier remplit où des individus sans moralité viennent se servir. Ces milliards transférés dans des comptes étrangers pouvaient utilement servir à payer des bourses, à construire des hôpitaux et autres infrastructures pour le développement du pays.

Partout en Afrique, nous retrouvons avec quelques déclinaisons, les mêmes « airs de famille », les mêmes façons de diriger l’Etat. Ceci pour dire que les civils intello-économistes (et autres) ne constituent plus des modèles politiques, des modèles de vertus politiques. Aussi n’est-il pas étonnant de voir, de revoir de manière récidiviste les mêmes « imprudences ». On peut donc convenir, qu’il existe, mieux les « imprudences » sont consubstantielles à l’exercice de la démocratie en Afrique, dans l’exacte mesure les uns et les autres ne vienennt pas pour gouverner, mais pour se réaliser, s’enrichir sans opprobre, avec la devise, ceux d’hier ont agit ainsi, aujourd’hui et demain, ce sera du pareil au même. Tel est le cercle infernal de la démocratie en Afrique. C’est éternellement l’adoration du veau d’or (le culte de l’argent et des richesses matérielles). Ethiquement, force est de se demander qu’est-ce que l’homme politique gagne à travers ces « imprudences » politico-pathologiques ? La réponse est sans ambages : il bafoue sa dignité, sa réputation pour des biens superfétatoires. Relativement au cas Karim Wade, à voir trop nuire à son pays, on perd finalement. A tout prendre, n’y a-t-il pas une déviation de l’immoral (qui est conscience de soi) vers l’amoral (absence de raison raisonnante) ? Quand un ministre de la République tel que Karim Wade du Sénégal, ou des ministres nigériens devenus milliards en l’espace de deux (2) ans, restent impunis, sans qu’ils justifient la provenance des ces milliards, l’Etat est en danger. Quand la raison s’exil de la gestion de l’Etat, il n’y a plus place pour le juste et l’injuste.

A terme, le politique sans conteste s’est éloigné de sa vraie vocation, celle qui consiste à assurer le bien vivre et le vivre bien des citoyens. Quand c’est la fonction mathématique inverse qui tient les commandes, qui tient lieu de règle d’or de gestion, alors on assistera indéfiniment à eux Cités pour parler comme Saint Augustin : la Cité infinitésimale des pauvres, et celle infinitésimale des riches, et des nouveaux parvenus. D’un mot, c’est l’aristocratie de la démocratie.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Docteur Youssouf Maïga Moussa
Publicité
Archives
Publicité